Mon commerçant refuse de me servir dans mon contenant

Acheter le fromage, le poisson, la viande et la charcuterie à la coupe c’est aujourd’hui quasi systématiquement se voir servi dans une boite plastique ou un papier. Apporter ses propres contenant pour éviter des déchets à usages uniques, il n’y a pas si longtemps, c’était soumis au bon vouloir du commerçant car il y avait un vide juridique. Ce n’est plus le cas depuis le 1er Janvier dernier : désormais un vendeur n’a théoriquement plus le droit de refuser ma boite, si elle est adaptée et propre. Mais ils sont rares à le savoir et dans le contexte pandémique actuel il est difficile de deviner, même parmi les boutiques sensibles à la démarche, celles qui accepteront mon propre récipient. Donc voici ce que dit la loi, comment elle a tendance à être appliquée en ce moment, des pistes pour présager d’une bonne acceptation de mon contenant et des arguments à avancer en cas de refus. 

J’ai le droit d’apporter mes boîtes chez le commerçant...

Loi anti-gaspillage pour une économie circulaire du 10 Février 2020

Cette loi est entrée en application le 1er Janvier dernier précise dans l’article L.120-2 du code de la consommation que : 

Tout consommateur final peut demander à être servi dans un contenant apporté par ses soins, dans la mesure où ce dernier est visiblement propre et adapté à la nature du produit acheté. Un affichage en magasin informe le consommateur final sur les règles de nettoyage et d’aptitude des contenants réutilisables. Dans ce cas, le consommateur est responsable de l’hygiène et de l’aptitude du contenant. Le commerçant peut refuser le service si le contenant proposé est manifestement sale ou inadapté.

 

Ce texte clair signifie que le commerçant doit accepter sauf s’il juge le contenant sale ou inadapté, que sa responsabilité sanitaire n’est pas engagée et qu’il doit prévoir un affichage en magasin signalant : 

-que les clients peuvent venir avec leurs contenants

-que les contenants doivent être propres et secs

-que tout contenant individuel est systématiquement vérifié

-que le service peut être refusé si le contenant est sale ou inadapté.

Plus question à présent d’invoquer des précautions d’hygiène ou une responsabilité sanitaire pour refuser le service en contenant, puisque cette loi a été rédigée, comme toute loi ayant trait au paquet hygiène, après consultation et avis positif de l’AFSSA-ANSES, organisme compétent en matière de sécurité sanitaire.  La même structure en Belgique, l’AFSCA, prend position très clairement dans cet article : faire ses courses alimentaires avec ses propres récipients : bien sûr !Et pour convaincre plus facilement votre commerçant voici un petit outil bien pratique : un flyer à imprimer et diffuser librement, qui comporte au recto la phrase "C'est la loi donc merci d'accepter de me servir dans mon contenant" suivie du nom de la loi et de l'extrait que vous avez lu plus haut, et au recto le logo "Ici sacs à vrac et boites propres acceptés" réalisé par Zéro Waste France, suivi de la phrase "conditions d'acceptation des contenants dans ce magasin : et de plusieurs lignes pour que le commerçant puisse indiquer s'il refuse les boites en plastiques par exemple, où si, comme le boucher situé dans la rue de La Consigne, il accepte uniquement les boites en verre, et dans quelles conditions.
Le but est de le présenter au commerçant pour qu'il connaisse cette "nouvelle" loi et qu'il puisse ensuite l'utiliser pour le remplir et l'afficher. Ce flyer est disponible à l'accueil de La Consigne, pour les clients qui souhaitent en prendre pour les déposer dans leurs commerces de bouche préféfés afin de pouvoir y revenir avec leurs contenants. Si vous êtes gérant d'un magasin zéro déchet, n'hésitez pas à en imprimer quelques uns et à les proposer aux clients. Si vous êtes un particulier, que vous avez la possibilité et le souhait d'en imprimer et de les distribuer n'hésitez pas. Vous pouvez également suggérer aux commerces vrac aux alentours de faire de même.
Affichette A5 recto verso Contenants propres acceptés à diffuser aux commerçants

Autre articles intéressants dans la loi anti-gaspillage 

Les grandes surfaces qui ont un rayon vrac devraient également adapter leur façon de fonctionner avec l’article  L112-9 du Code de la consommation : “les commerces de vente au détail disposant d’une surface de vente supérieure à 400m² s’assurent que des contenants réutilisables propres, se substituant aux emballages à usage unique, sont mis à la disposition du consommateur final, à titre gratuit ou onéreux, dans le cadre de la vente de produits présentés sans emballage”

 

Et un petit dernier, que j’aimerais personnellement bien voir en application, avoir une ristourne si j’arrive à me faire servir dans ma gourde plutôt que dans un gobelet jetable : 

Article L. 541-15-10 III du Code de l’environnement :”Les vendeurs de boissons à emporter adoptent une tarification plus basse lorsque la boisson est vendue dans un récipient réemployable présenté par le consommateur par rapport au prix demandé lorsque la boisson est servie dans un gobelet jetable.”

...mais la Covid 19 laisse un doute sur son acceptation par mon commerçant

Comme évoqué plus haut il est maintenant légal de se présenter dans les commerces et rayons fruits et légumes, boulangerie, poissonnerie, boucherie, fromages...etc... pour faire remplir ses propres récipients.Toutefois, les mesures sanitaires prises dans le cadre de la lutte contre la pandémie de Covid-19 semblent, parfois, pour l’instant, prendre le pas sur cette nouvelle loi. 

Le Réseau Vrac, association qui regroupe les professionnels du vrac, qu’ils soient producteurs, commerces ou porteurs de projet à émis notamment la recommandation sanitaire suivante : 

“Dans la mesure du possible, nous recommandons au commerçant d’utiliser ses contenants et sacs à vrac, préalablement lavés et désinfectés, plutôt que les contenants apportés par le consommateur, afin de limiter le risque de transmission du virus. Si le commerçant continue à autoriser l’utilisation des contenants apportés par les consommateurs, nous recommandons de désinfecter l’extérieur des contenants, en magasin avant utilisation, avec un désinfectant sans rinçage.”

C’est la procédure qu’a choisi de mettre en place La Consigne depuis plusieurs mois, dès le début de la pandémie : les contenants en verre, métal, plastiques qui peuvent être désinfectés peuvent être remplis à la demande. Les sacs en papier et en tissu, n’étant pas désinfectables, ne peuvent être utilisés que par les clients eux-mêmes, pour transvaser les bocaux dans ces contenants. 

Comment savoir si un commerçant risque de refuser mon contenant

Je vois l’affiche “Mon commerçant m’emballe durablement” en vitrine

Si vous observez une affiche “mon commerçant m’emballe durablement” ou “sacs à vrac et boîtes propres acceptés” vous avez de grandes chances d’arriver dans un magasin déjà sensibilisé à la démarche. C’est un bon indice mais cela ne signifie pas qu’il acceptera à coup sûr votre contenant car depuis le début de la pandémie Covid 19  parmi toutes les boutiques qui acceptaient le service en contenant certaines ont continué de les accepter, d’autres ont refusé un temps les contenants puis ont de nouveau accepté de les utiliser, et d’autres enfin refusent tout net ce type de service malgré l’affiche qu’ils conservent en devanture. Bien malin qui pourra donc prédire la réaction d’un commerçant, même avec cette affichette. 

J’ai l’habitude d’aller chez un commerçant qui emballe les produits 

Si vous ne voulez pas risquer d’essuyer un refus et avez l’habitude d’aller chez un commerçant mais que vous ne savez pas s’il accepterait de vous servir dans votre contenant vous pouvez toujours poser la question en faisant vos courses comme habituellement, et discuter avec lui des raisons qui vous poussent à le lui demander, voire énumérer quelques-uns des arguments ci-dessous. 

Si vous le voyez hésitant ou pas franchement convaincu vous pouvez lui laisser ou lui amener la fois suivante un petit document qui récapitule la loi, pour qu’il puisse le lire tranquillement et vous dire la fois suivante s’il accepte ou pas. 

 

Comme précisé plus haut, le vendeur a le droit de refuser le récipient s’il juge qu’il ne conviendra pas pour transporter son produit ou qu’il n’est pas propre : 

Le choix des récipients est donc important : il faut qu’il soit toujours adapté au produit que l’on souhaite acheter et qu’il soit dans un état impeccable. Si vous ne savez pas à l’avance ce que vous avez l’intention d’acheter, n’hésitez pas à prévoir différentes boîtes de diverses tailles, quitte à en ramener une ou deux de vides à la maison. 

 

Vous vous êtes lancé, vous avez demandé et le vendeur refuse de vous servir dans votre récipient alors que c’est la loi? C’est irritant, et ce n’est jamais agréable d’essuyer un refus et de voir ses projets contrariés.

Même si cela n’est pas dans votre tempérament, il est important de toujours rester très calme et souriant, bienveillant, et de tenter de comprendre pourquoi le commerçant refuse :  

Peut-être ne sait-il pas que la législation a changé, où peut-être se trouve-t’ il décontenancé par cette demande insolite et, ne sachant pas trop quoi répondre, préférera la sécurité de ses habitudes en invoquant les précautions d’hygiènes indispensables (ayant peur que sa responsabilité sanitaire soit engagée en cas de contamination), le fait de ne pas pouvoir faire de tare sur sa balance, de trouver le service plus long et moins pratique que dans ses boîtes ou papiers à portée de main et sans tare...ou toute autre excuse ou raison qu’il jugera valable. 

Que dire à un commerçant qui refuse mon contenant

“Je ne veux pas contribuer à épuiser les ressources de la planète et à polluer l’océan”

Pas évident de placer cette phrase engagée...mais pourtant réaliste. Personnellement je n’ai jamais eu le courage de la dire celle-là, alors que je suis engagée dans la démarche depuis plus de 5 ans. Voyons s’il y a moyen de paraître moins culpabilisant moins “écolorigide”, car clairement ce genre de petites sentences ne rendent pas sympathiques aux yeux des autres. 

“Dommage cela vous aurait fait quelques centimes de marge en plus”

C’est un argument qui peut faire écho chez beaucoup de commerçants, bien conscients que leurs bénéfices ce sont leurs ventes moins leurs dépenses, et que tout ce qui contribue à diminuer ces dernières augmentent automatiquement les premiers. 

Ces emballages qui sont utilisés une seule fois ont un coût, qui vient diminuer la marge réalisée par le commerçant. Boite à pizza en carton, barquette plastique, papier d’emballage pour la viande, les fleurs...À l'échelle d’un client c’est certes très modique mais plus il y aura de clients à venir avec leurs propres contenants plus l’économie sera importante. Donc venir avec mon contenant c’est une autre manière de soutenir mon petit commerce de proximité, en lui permettant cette économie, en plus des achats que j’effectue chez lui. 

“Je n’ai pas la place de mettre une poubelle chez moi”

C’est l’excuse qui était généralement donnée par Béa Johnson au début de sa démarche de limitation des déchets, quand les commerçants la regardaient avec de grands yeux ronds, de surprise, quand elle leur tendait son contenant à remplir. Donner une explication pratique lui permettait de comprendre immédiatement le but de la démarche sans s’engager dans de grandes discussions philosophiques. Malin non? 

“Tant pis, je vais aller chez machin, une copine m’a dit que lui acceptait les contenants”

“...c’est dommage parce que ces produits là me faisaient bien envie. Je vous laisse tout de même ce document, avec mon numéro de téléphone, prévenez-moi si vous changez d’avis.” 

Des boulangers, pâtissiers, bouchers, poissonniers, primeurs, épiciers...etc...il y en a en général quelques échoppes par agglomération. Avec le développement du vrac il serait vraiment vraiment étonnant de ne pas trouver une ou plusieurs boutiques de chaque profession qui accepte les contenants. 

Faire comprendre que ce petit service que l’on demande est important pour nous et qu’il peut nous amener à carrément envisager de ne pas acheter cela peut donner à réfléchir à un commerçant qui ne souhaite pas voir sa clientèle fuir vers ses concurrents.   

“Je suis allergique au plastique” 

Cette excuse ne fonctionne que si c’est la première fois qu’on va chez ce commerçant et s’il n’a pas d’emballage papier à vous proposer mais des barquettes en plastique. Et s’il n’y a pas d’un coup 10 ou 15 personnes qui l’utilisent. Sinon c’est sûr, on se fait griller. 

“J’ai parié qu’aujourd’hui j’arriverai à faire toutes mes courses sans un seul déchet”

Phrase qui peut être suivie par “.Aidez-moi à gagner il y a un mois de vaisselle en jeu” pour enfoncer le clou et susciter la sympathie du commerçant, lequel acceptera plus facilement, pour cette fois, de faire une entorse. La gageure c’est de revenir la semaine suivante avec un contenant...avec un sourire complice...en espérant qu’il acceptera encore de le prendre : qui vivra verra... 



La loi a évolué car l’exemple de consom’acteurs, avec le mouvement Zero Waste France et la démarche “Mon commerçant m’emballe durablement” notamment, a montré qu’il était possible de faire ses courses sans utiliser d’emballages à usage unique, lesquels génèrent près de 70% de la pollution de nos plages. 

Il reste à présent à faire en sorte que cette nouvelle réglementation puisse être appliquée, même en ces temps de pandémie, en informant les commerçants de leurs nouvelles obligations, et en restant bienveillant et souriant face aux refus. Faire ses courses en mode Zéro Déchet ce n’est pas toujours simple, mais à présent qu’il y a un cadre légal, cela devrait être plus facile que par le passé. Bientôt la principale difficulté sera simplement d’avoir avec soi les accessoires indispensables pour des courses en vrac.

 

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